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Le rap français et ses univers

Jeune passionné de rap français qui cherche à transmettre sa passion à travers des articles présentant des artistes, morceaux ou encore projets !

Médine « Enfant du destin », la série de morceaux engagée

Une série de sons qui ne date pas d’hier :

 

Médine, rappeur venu du Havre, est une figure emblématique du rap français présent sur cette scène depuis 1998. Lui qui est à la conception de 7 albums, dont le dernier nommé « Grand Médine » sorti en 2020, est également apprécié par le public pour ses talents de storyteller. On peut retrouver ces storytellings dans une série de morceaux commencée en 2004 qu’il a nommée « Enfant du destin ». Dans ces sons, Médine raconte l’histoire fictive (ou non) d’enfants victimes d’un destin tragique lié aux conflits présents dans leur pays. C’est donc à travers l’histoire de 8 enfants (8 morceaux) que Médine montre la situation terrible de différents peuples dans le monde.

La touchante histoire fictive de Nour :

Cover du morceau "Enfant du destin - Nour"

 

Le morceau « Enfant du destin - Nour » est le sixième morceau de la série et est présent sur l’album Prose élite de Médine sorti en 2017. Dans ce son, le rappeur raconte l’histoire fictive d’une jeune fille birmane nommée Nour. Cette fille fait partie du peuple des Rohingyas qui est une communauté persécutée par le Myanmar (ex-Birmanie) comme nous l’explique Médine « Ce peuple d’apatrides dont plus personne se soucie, pas même la nobel de la paix Aung San Suu Kyi ». Nour vit seule « depuis que ses parents sont morts dans la cale d’un boat-people » et travaille au service d’un exploitant agricole afin d’obtenir un minimum d’argent. Un jour, son patron tente de la violer et, en se débattant, Nour tue son patron en lui adressant un coup de bouteille dans le crâne. Nour décide de fuir et de repartir dans sa ville.     

 

Médine nous dévoile ensuite ce que cela fait d’être un Rohingya au Myanmar à travers de nombreuses lines qui montrent cette persécution « Le Myanmar a mit à mal toute mon ethnie, il faut naître bouddhiste ici en gros si tu veux être libre », « Surpeuplé, mon village, c’est le marché aux bestiaux et à chaque fois que je veux en sortir, un policier me questionne ». 

 

À la fin du morceau, Nour, en voulant se rendre à l’école, va croiser 5 moines qui vont s’acharner sur elle, la frapper sans répit et vont finir par la brûler vive. 

 

À travers une histoire qui est certes fictive, Médine dénonce les réelles conditions de vie des Rohingyas en montrant notamment que ce peuple est massacré pour ce qu’ils sont par les autorités birmanes sans que personne n’agisse.

Le storytelling majestueux sur le « grand chef » Ataï :

 

                                                      Crâne d'Ataï exposé dans un musée européen

 

Présent sur son album Storyteller sorti en 2018, le morceau « Enfant du destin - Ataï » est le 7e morceau de la série. Dans ce morceau, Médine va évoquer cette fois-ci une histoire vraie qui est celle du jeune garçon nommé Ataï, le grand chef des Kanak qui est un peuple natif de Nouvelle-Calédonie. 

                                                                                      

Ataï vit à l’époque de la colonisation et voit les colons tenter de s’approprier le territoire de son peuple. Les colons vont « construire des prisons et des bagnes » sur cette terre et vont kidnapper les femmes Kanak pour en faire leurs esclaves sexuelles. 

 

Médine raconte, dans un premier temps, le périple de Ataï qui, en tant que meneur des Kanak, va vouloir sauver une femme Kanak faite esclave par les colons. Ataï gagna le combat face au « maître colon » et libéra la femme. 

 

Mais, en revenant vers son village, Ataï comprend qu’en partant au secours de cette femme, il « a laissé son village sans protection » et que les colons en ont profité pour prendre d’assaut le peuple Kanak. Il repart donc au combat pour cette fois-ci tenter de sauver tout son peuple qui n’a pas les moyens de se défendre face aux colons. Mais, lorsqu’il se bat, Ataï reconnaît un visage parmi les troupes ennemies. En effet, il s’agissait d’un Kanak qui s’est rallié aux colons et qui a donc trahi son peuple. Ce Kanak va décapiter Ataï.

 

La dernière line que délivre Médine dans ce morceau « Son crâne fut exposé dans les musées comme un trophée » montre que le squelette de la tête d’Ataï, au lieu d’être laissé à ses descendants, a d’abord été exposé dans des musées (à Paris) loin de la terre d’origine d’Ataï. Ce n’est qu’en 2014, après 136 ans d’exposition du côté de l’Europe, que son crâne a été rendu aux descendants Kanak.

Médine derrière la cause des Ouïghours :

 

Source image : https://t.co/S2sTpYkdN6?am

 

 

 

Médine soutient également les causes les plus actuelles comme celle des Ouïghours, peuple qui vit actuellement un génocide en Chine. Il va dénoncer ce drame dans le morceau « Enfant du destin - Sara » présent sur son dernier album Grand Médine sorti en 2020. On retrouve notamment le carré bleu sur la cover de cet album, symbole du soutien envers les Ouïghours.

 

Dans ce son, Médine va prendre l’exemple d’une petite fille Ouïghour de 12 ans nommée Sara pour dénoncer les atrocités dont les Ouïghours sont victimes. Cette jeune fille sait que son peuple est persécuté par les autorités chinoises « Dans la vieille ville y a le bruit qui court qu’on déporte tout ce qui ressemble aux Ouïghours ». Son père a été tué et sa mère a été stérilisée. 

 

Médine explique par la suite que les Ouïghours n’ont aucun droit « Un million de Ouïghours mis à huit clos pour des images religieuses dans leurs Wiko » et que la plupart d’entre eux sont envoyés dans des camps où ils sont torturés et voire même victime d’abominations « Il paraîtrait même que nos organes sont vendus aux malades des pays arabes »

 

Un jour, Sara décide de faire une vidéo sur le réseau social Tik Tok afin qu’on vienne aider son peuple. Mais les Ouïghours sont surveillés de tous leurs faits et gestes en Chine et quelques heures seulement après que Sara a posté la vidéo, les autorités chinoises ont arrêté la jeune fille chez elle, l’ont mit nue et l’ont envoyée dans un camp de rééducation. Sara va vivre ce qu’ont vécu les autres femmes Ouïghours avant elle, elle va subir un traitement qui a pour but de la rendre docile et de supprimer ses règles. Médine fait ensuite comprendre que les autorités chinoises ne laissent aucune liberté aux Ouïghours « Ils nous ont dit que c’est ici qu’on passera la fête de l’Aïd ».

 

Dans le second couplet de ce morceau, Sara se fait raser la tête afin que ses cheveux soient ensuite vendus et va être forcée à manger du porc alors qu’elle est musulmane. Ces hommes vont tenter de lui enfoncer un stérilet contre sa volonté, mais c’est à ce moment que Sara va se rebeller. Elle va frapper le chef de l’unité et va tenter de fuir le camp « Sort dans le couloir et cours de toutes mes forces, crache sur leurs uniforme de bons patriotes ». Sara a même du mal à s’échapper à cause des perfusions qu’elle a subie et qui lui « embrouille le crâne ». Elle sait qu’elle n’arrivera pas à fuir et que c’est sa « dernière cavale ». On comprend que, à la fin de cette histoire, Sara a ensuite été torturée et que son corps a été électrocuté et qu’elle est donc probablement décédée.

 

La série de morceaux « Enfant du destin » est l’une des meilleures séries du rap français, car elle permet d’apprendre énormément de choses sur ces peuples opprimés. Médine arrive à nous plonger au cœur de ces histoires notamment grâce aux bruits de fond qui retranscrivent chaque histoire. Plus les années ont passé plus la voix de Médine est devenue moins agressive certes, mais il arrive toujours à transmettre ces émotions aux auditeurs, car c’est certainement le meilleur storyteller du rap français.

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